Victime d’une hémorragie huileuse, ma voiture devait être traitée d’urgence chez mon garagiste. Ce dernier, ému de me voir rentrer chez moi à pied sous une pluie battante et un vent battant les volets, me pris sous son aile protectrice dans sa voiture de service.
Chemin faisant, apprenant que mon travail passé concernait la recherche pharmaceutique, il m’annonça soudain « mais pourquoi les médicaments sont-ils désormais tous dangereux ? ».
Sa question me rendit muet…
Comment répondre à une telle question dans les quelques secondes qui restaient à conduire pour arriver à la maison ?
Ma réponse sur le fait que toutes mes substances que l’on avale, peut être toxique si on en avale trop fut le seul argument que j’eus le temps de développer.
De retour dans mes pénates, je réalisai que ma réponse était inappropriée car elle confirmait que les médicaments étaient dangereux et je constatai alors que nous étions tous dans une situation ahurissante !!!
Les médicaments sont dangereux !!!
Par quel miracle avons-nous transformé un progrès scientifique majeur de ces deux dernières centaines d’années en une crainte fangeuse… en final j’avoue ignorer comment cela s’est produit.
Par contre j’ai réalisé à quel point j’avais sous-estimé le rôle qui aurait dû être le mien dans ce processus, à savoir valoriser les médicaments selon mes savoir et mes croyances…
Élevé dans le respect des autres et dans l’universalisme béat où chacun a des droits et des devoirs égaux, j’ai trop longtemps pensé que mes congénères avaient la même approche du monde…
Erreur fatale !
Que d’avis débiles sur les réseaux laissés sans réponse, que de remarques acerbes sur les effets négatifs des médicaments diffusés sans rappeler les vies sauvées, que de responsables du marketing présentant des produits soit disant panacées sans danger, que de bilan à charge sur des vaccins qui sauvent des millions de personnes, que d’agressions sur les bénéfices d’entreprise qui investissent des milliards pour rechercher des nouveaux traitements, et que dire de mon travail de nuit pour étudier des cellules à visée thérapeutique et du travail ingrat sur des animaux de laboratoire, unique moyen d’identifier des molécules actives à utiliser chez l’homme, et que dire encore de cette phrase d’un médecin qui testait le produit que j’ai conduit en clinique « mais il marche votre produit ! », un patient condamné par la maladie était toujours en vie…
Voilà ce que j’aurais dû faire au lieu de croire que la vérité et le bon sens s’impose toujours…
Ce qui est valable pour les médicaments est valable pour toute l’organisation de notre société… gavés de bonheur matériel, passionné par mon travail, j’ai oublié que les égouts de l’obscurantisme étaient toujours en activité…
Envies et besoins
